Tout sera visible

The Bells Angels (Simon Bernheim, Julien Sirjacq, Jérémy Vitté)
Sound design Étienne Bonhomme


Du 06/11/2023 au 24/02/2024

Théâtre d’Hérouville
Entrée libre

Vernissage :

Mardi 14 novembre à 18h

Les équipes de la Comédie de Caen ont découvert avec stupeur le hall du théâtre d’Hérouville ce lundi matin. Vandalisme ou hommage, difficile de qualifier le capharnaüm qui se déployait sous leurs yeux. En observant les graffitis raturés sur les murs, ils ont rapidement fait le lien entre cette graphie si particulière et les écritures rouges qu’ils avaient lues sur les brochures, les flyers ou les affiches de la Comédie de Caen. Cette chimère devenait-elle réalité ? Les premiers témoins jurent qu’ils ont même entendu une voix, ou plutôt un murmure, planer dans l’espace.

« Le plus fou dans cette histoire, c’est qu’on a lu les mots que cette personne écrivait partout dans le théâtre sans jamais se demander à quoi elle ressemblait, ni d’où elle venait ! » raconte Charles, encore sous le choc de cette découverte.

Cette personne reste le grand mystère d’une histoire qui aura duré presque 10 ans. Avant de quitter les lieux, il semblerait que ce fantôme ait tenu à livrer au théâtre tout ce qu’il possédait. Des morceaux de décors en guise de murs, une cuisine de fortune, un lit, des perruques, des machines démontées, de médicaments, des piles de livres, de découpages, de feuilles et de revues, voilà en quelques mots à quoi ressemble la planque de cet homme de l’ombre.

Entrer dans ce lieu, c’est pénétrer dans le cerveau d’un misanthrope qui aura passé des années à vivre caché, à observer, glaner, archiver tout ce qu’il trouve. C’est aussi rencontrer un boulimique de théâtre, un passionné des mots qui aura passé ses journées et ses nuits à lire, analyser, commenter tout ce que ce lieu pouvait créer. Un espace de travail qui ressemble aussi à un lieu de vie, tant les ordures se mélangent aux livres. Cet homme invisible a voulu tout rendre visible, sans filtre, son érudition autant que son alcoolisme.

« C’était une sensation très étrange, raconte Grace, je n’avais plus l’impression d’être au travail, mais d’être chez quelqu’un. C’est comme si j’étais devenue une étrangère dans un lieu que je fréquente toute l’année ! »

Qui est cet individu ? Où est-il ? D’où vient-il ? Nul ne le sait. Ne reste qu’un sentiment étrange et contradictoire de le connaître intimement sans l’avoir jamais rencontré.

« Rien que d’imaginer qu’il était là, autour, cela me glace le sang. (Aurélia agite les mains en l’air.) En même temps, je dois dire que j’éprouve une certaine tristesse en apprenant qu’il est parti. »

Malgré l’amoncellement d’ordures et de décors, on sent un grand vide dans ce hall du théâtre d’Hérouville. Il ne reste plus que les derniers mots rouges laissés sur le mur de l’entrée, par le démon cultivé :

« Je suis partout et nulle part. Mais à présent ailleurs ! Bye bye ! Je file. J’ai tout dit, j’ai tout vu. Je n’ai jamais aimé le vide. Je ne sais plus. Tout sera visible. Tout sauf moi. Mais attention. Je ne suis pas votre superstition. »

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